Walter Hauwaert, disquaire bruxellois, ne nourrissait pas qu’une immense admiration pour le rocker aux yeux bleus (voir article précédent). Aux cinq sens classiques, le « Wolle » en a rajouté un sixième : celui des affaires. Les portes de son magasin étaient toujours grandes ouvertes pour les fans de Johnny Hallyday.
« Johnny était l’un des leurs »
Quand Walter a commencé comme employé d’un grossiste en disques, Musico, il voyait des clients étiquetés « fans de Johnny ». Reconnaissables entre mille, mais en même temps si différents : de 7 à 77 ans, du balayeur de rue au notaire.
Walter : « Johnny était des leurs. C’était un gars du peuple, devenu leur idole. J’avais déjà pris conscience du phénomène. Quand j’ai repris le magasin Disco 2000 en 1978, les disques du chanteur ne peuplaient pas les bacs puisque le vendeur précédent, flamand, orientait plutôt sa clientèle vers la chanson anglaise ou le disco. Mes premiers clients m’ont demandé du Johnny, mais mon stock était alors insuffisant. »
Le nez fin, l’ouïe fine
Dans le passé, les disquaires étaient parfois invités par les firmes de disques pour passer des commandes d’hiver à de meilleures conditions, essentiellement sur les fonds de stock ou les sorties imminentes. Certaines pointures raillaient alors notre Walter, assimilé à son idole. « Hey, le Wolle, y sont pas un peu spéciaux tes fans de Johnny ? » « Tu n’as qu’à me les envoyer », répondait alors Walter. Ambiance.
Comme la plupart des grosses enseignes snobaient la star française… et ses fans, par ricochet, Walter s’est dit : « je vais aux concerts comme eux, je les connais, je vais me spécialiser dans cet artiste. »
Johnny a représenté à lui seul 20 % du chiffre d’affaires de Walter Hauwaert.
Deux personnes ont achevé de le convaincre de vendre du Johnny : Jean-Marie Seron (chef de vente chez Polygram et, Chantal, la femme de son meilleur ami, Ronald Dubois. Walter a commencé à suivre l’artiste en 1993, puis à devenir un des spécialistes à Bruxelles de 1998 jusqu’à la fermeture définitive de son magasin, en mai 2017.
Même s’il a perdu des clients à cette occasion (non, tout le monde n’aimait pas Hallyday), de nombreux fans ont gagné le magasin anderlechtois de la rue de Formanoir. Des clients au cœur d’or dont tout l’argent partait dans des produits Johnny : disques, K7 mais également affiches, T-shirts, montres…. Un merchandising très rentable aussi : une montre vendue 1000 BEF lui coûtait 500 BEF plus TVA. Pas de vente de places de concert, toutefois.
« Walter : chaque nouvel album, c’était la folie (j’en commandais parfois 250 pièces, l’album « Gang » par exemple) »
Johnny, un chanteur à part et pourtant si proche
Bien sûr, cet artiste a connu des bas. Walter se souvient d’un 45T en velours (!) qu’il a eu toutes les peines à écouler. Cette rareté se négocie à présent 500 euros sur eBay.
Mais quand Johnny atteignait des sommets, tout le monde suivait ! Par exemple ses 50 ans au parc des Princes en 1993, ou son arrivée en hélicoptère en 1998 au Stade de France. Walter se souvient.
Pour pouvoir assumer ce statut de disquaire spécialiste en Johnny, il fallait immédiatement satisfaire ses fans qui n’aimaient pas attendre… Leur appétit était immense. Peu importe les styles musicaux du chanteur (rock, ballades), quelles que soient les époques (la crise, l’inflation, les copies pirates…), le fan de Johnny voulait tout et parfois dans plusieurs supports différents.
Leur idole a toujours su se remettre en question, « forcer sa force à cet effort » comme dans sa chanson J’ai oublié de vivre, en assumant aussi ses échecs (sans doute pas toujours bien conseillé, reconnaît Walter). Ses fans sont restés en contact avec le disquaire, après la fermeture de son magasin de même qu’à l’occasion de la mort de l’artiste.
À suivre : les débuts de la carrière… de Walter !
À lire : Johnny Hallyday par celui qui le vendait !
Merci Olivier Rouge pour la relecture et Walter pour le prêt des photos.
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